Mieux qu’un cours de philo.
Chef’s table, ce n’est pas un énième documentaire banal et soporifique sur des chefs que l’on cuisine avec des questions triviales ressassées et qui répondent en mode pilote automatique ou avec des répliques pré-rédigées par un bureau de presse.
Chef’s Table présente ces six chefs habités par leur passion de la cuisine au travers de leur démarche intellectuelle, spirituelle et artistique.
Foin des convenances, foin des artifices, ces derniers se dévoilent, sans fard, en toute transparence : leur parcours, leur expérience (échecs et doutes compris), leur tempérament (sale caractère ou ego boursouflé assumés, rage de vaincre, générosité), leur enfance, leur « garde rapprochée », leur conception de la vie et leur rapport au monde.
Ces portraits sont touchants d’authenticité, empreints d’humanité et intenses en émotions.
Grâce à Chef’s table, nous, téléspectateurs, partons à la rencontre de ces génies à la personnalité hors du commun. On réalise que ces chefs sont non seulement des virtuoses de la cuisine, chefs d’orchestre charismatiques mais aussi des chercheurs-scientifiques-alchimistes du goût responsables et visionnaires.
La recette du succès de ces toqués de cuisine ? Un soupçon de doute, quelques échecs, une pointe de culot, une pincée d’ingéniosité, une touche d’ambition, un zeste de curiosité et une tonne de travail.
6 X 45 minutes de philosophie de vie qui émeuvent et reboostent !
Je suis sortie de Chef’s table avec plein de questions existentielles mais gonflée à bloc !

Un chef d’œuvre.
Alors, certes, les personnalités des chefs choisis contribuent largement à l’intérêt de cette série mais la mise en scène est tout aussi importante et Chef’s Table est, je trouve, une merveille cinématographique.
À l’instar des cuisines dans lesquelles elle se faufile, elle est précise, nette et juste.
Le ton, le rythme, la musique choisie, les plans, le montage, les témoignages de critiques gastronomiques et les propos tenus par les chefs, leurs proches et leurs personnels…
On tutoie la perfection !
J'ai dévoré des yeux les plats, les paysages et j'ai bu les paroles de ces chefs tellement créatifs et si talentueux : un régal absolu !
Chapeau bas au réalisateur David Gelb !
Et pssst, David, pour la saison 2 de Chef’s Table, si tu recherches un chef français, je te conseille Thierry Marx !

Morceaux choisis.

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Massimo Bottura, chef italien du restaurant Osteria Francescana à Modène en Italie.
L’amoureux fougueux et rock’n’roll.
Le chef trublion dont l’ingéniosité chamboule les principes de la cuisine traditionnelle italienne.
« Ce pigeon (rapport à une œuvre d’art lors de la Biennale de Venise de 1997), c’est comme moi. Je veux changer la cuisine italienne mais pour me faire remarquer, je dois monter dans les chevrons, regarder d’en haut et, en un sens, dégrader la génération qui m’a précédé. Ce n’est qu’avec ce sensationnalisme et ce comportement provocateur que je vais pouvoir percer et ouvrir les portes pour une autre génération de cuisine italienne. »
« Si on a du succès, si on vit un moment de bonheur incroyable ; ce bonheur est bien plus profond et puissant si on le partage avec les autres. Cette joie intense, cette explosion de sentiments est alors multiplié par deux. L’essentiel est là ! »

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Dan Barber, chef américain du restaurant et de la ferme Blue Hill à New York et à Stone Barns aux États-Unis
Le fermier agitateur.
Chef cultivateur, il prône une alimentation responsable qui passe par une agriculture éthique et durable.
« Michael Pollan a dit : on est ce qu’on mange et ce que mange ce qu’on mange ! »
« Si on pense à une idée qui peut être résolue sur une vie alors on ne pense pas assez grand ! »
« Sans les bons ingrédients, pas de bonne cuisine. Pour trouver la meilleure saveur, il faut les meilleurs ingrédients et pour ce faire, il faut une super agriculture. »

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Francis Mallmann, chef argentin du restaurant Patagonia Sur à Buenos Aires en Argentine
Le « maître du feu » affranchi.
Le Marc Veyrat argentin propose une cuisine primitive et terrienne. Il a une vision assez incroyable de la vie !
« Je cuisine toujours dans des lieux retirés, dans la nature et avec le feu. Avec ma cuisine, je veux transmettre le message d’un mode de vie. Et mon message, c’est : quittez votre chaise, votre divan, votre bureau, sortez ! »
« Ma vie est un sentier au bord de l’incertitude. Aujourd’hui, on éduque les enfants à se poser dans un fauteuil confortable. On a son boulot, sa petite voiture, un endroit où dormir et les rêves sont morts ! On ne grandit pas sur un sentier protégé. On doit tous conquérir quelque chose dans la vie. Ça demande beaucoup de travail et des prises de risque. Pour grandir et s’améliorer, il faut frôler un peu l’incertitude. »

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Niki Nakayama, chef japonaise du restaurant N/Naka à Los Angeles aux États-Unis
La bosseuse déterminée adepte du profil bas. #Kuyashii
C’est la seule femme chef de la saison 1 de Chef’s Table. Créative, très attentionnée, elle revisite l’art du kaiseki japonais.
« Le kaiseki utilise les meilleurs ingrédients à disposition, les présente sans altérer leur texture ni leur goût et il utilise différentes méthodes pour les valoriser. Il faut apprécier à sa juste valeur ce que la nature nous offre. »
« Du fait de ma culture, les affirmations fortes et effrontées me mettent mal à l’aise. Mais avec la cuisine, j’ai le droit de m’affirmer : la cuisine peut être égocentrique, bruyante, agressive. Elle me permet d’avoir des idées folles, d’expérimenter, de ne pas suivre les règles. »

ChefsTable_Ben_Shewry.jpg Ben Shewry, chef néozélandais du restaurant Attica à Melbourne en Australie
L’exalté de la nouveauté.
Cet amoureux du terroir, toujours en quête de nouveaux goûts, de nouvelles alliances pour valoriser au mieux un produit est aussi un chef très soucieux de son entourage.
« La cuisine ne devrait pas être une torture artistique mais quelque chose d’édifiant, de satisfaisant et de délicieux. Elle devrait revigorer les gens. Et on ne peut y parvenir que si on est heureux. Impossible de créer quoi que ce soit de significatif en cuisine sans être heureux. »
« Les ingrédients du terroir sont très difficiles à exploiter. Il n’y a aucune info à leur sujet sur Internet, aucun livre de recettes où ils sont utilisés. Quand on développe un plat comme le kangourou, on veut le travailler d’un tas de façons différentes. Avec le temps, qu’il s’agisse de trois mois ou de deux ans, on se dit : je finirai par déceler la grandeur de cet ingrédient. Je vais trouver la façon, la plus délicieuse et naturelle de le cuisiner. »

ChefsTable_Magnus.jpg Magnus Nilsson, chef suédois du restaurant Faviken à Järpen en Suède
Le créateur de l’extrême.
Loin de tout, dans une bourgade où rien ne pousse en hiver, ce Hanson suédois a créé un refuge de bonne cuisine qui a convaincu les masses de braver le froid et la distance.
« En cuisine, il est important de ne pas prendre les choses telles quelles, il faut aller au-delà. Les choses qui nous intriguent, nous intéressent, il faut les étudier : qu’est-ce que c’est ? Pourquoi c’est comme ça ? Comment le transformer pour l’améliorer ? Ce qui est intéressant avec la cuisine mais aussi un peu effrayant, c’est que dès qu’on arrête de s’entraîner, on a tendance à oublier. Plus personne ne sait comment faire quelque chose de ses mains. Et au bout de trois générations, il ne reste que des photos. Impossible de remonter le temps pour voir comment on cuisinait il y a 1 000 ans, comme pour la sculpture, la peinture ou autre. On peut observer un bloc de marbre sculpté en Grèce antique et voir comment ça a été réalisé mais il ne reste pas de jambon cuit de la Grèce antique pour nous montrer comment ils faisaient ! La cuisine est donc très spéciale parce qu’elle est aussi la manifestation culturelle la plus importante. Où que l’on se trouve sur la planète, on doit bien tous manger ! »
« On est tous là pour une certaine période donnée et on doit en faire quelque chose. Et le mieux, c’est de bien faire les choses ! »

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Je file, je vais regarder le film Jiro Dreams of Sushi du même réalisateur !